vendredi 11 février 2011

Amour Fou 33

Amour Fou 33
Court mais Drame d’Anais et d’Antoine


IL ÉTAIT UNE FOIS, APRÈS LE GRAND KRACH BOURSIER DEUX ÊTRES INCURABLEMENT HYPERSENSIBLES, VISIONNAIRES, UN HOMME ET UNE FEMME, ARDENTS DÉCADENTS INSATISFAITS DE CE MONDE, FUGITIVES DANS LA POÉSIE, PRÈS À BOUSCULER NOS SENTIMENTS, NOS PENSÉES ET NOTRE LANGUAGE. ILS SE RENCONTRÈRENT TRAGIQUEMENT À PARIS EN ÉTÉ 1933.
ENSORCELÉ L’UNE DE L’AUTRE, LEUR AMOUR REVOLUTIONAIRE ET CONQUERANT SE PERDAIT DANS LE CHAOS HISTORIQUE. ET LES HOMMES PRENNAIENT LEUR CHEMIN HORRIBLE.



Écrit et raconté par
Eckhardt Momber en collaboration avec Geneviève Momber
Inspiré par le Journal d’Anais Nin des années 1932 -1934 et par les Textes d’Antonin Artaud

Tout en noir, pied nus, cagoule, vient un immigrant avec une lampe sur le front, concentre la lumière pour un petit moment pleinement sur la statue d’Artaud, le tâte avec sa lampe frontale du haut en bas, touche et suit les mains, les pieds, montrant le corps, le cou, reste sur la figure, les yeux, descend le long du cou, suit le bras, les doigts de la main : Artaud s’arrache les cheveux ! L’immigrant s’en va.
L’immigrant revient avec un pied du micro mais sans microphone, tourne autour Artaud, pose le pied du micro devant lui et s’en va.
L’immigrant revient avec un deuxième pied du micro sans micro, le pose à gauche d’Artaud, pend dessus une jupe rouge en soie, des bas en soie, des jarretelles, un chapeau extravagant des femmes d’autrefois, foufou, regarde Artaud et s’en va.
L’immigrant revient avec un troisième pied de micro sans micro dans une main et un bonnet des détenus et une casquette dans l’autre, pose le pied du micro à droite d’Artaud, suspend bonnet et casquette, fixe Artaud et s’en va.
-
Après un petit moment l’immigrant revient les mains sur le dos, se met derrière le micro de la femme extravagante, laisse tomber ses pantalons noirs, s’habille avec la jupe rouge, met le chapeau et, en fixant Artaud avec sa lampe, elle commence à se souvenir et parle :
Anais : Je me promenais le long de la Seine
J’écoutais l’Haleine jeune et joyeuse de la Terre
Et l’Amour m’envahit par Surprise, sans que j’y pense, presque paisiblement, comme une Aube qui se lève lentement, un lent épanouissement né de l’Abandon, tombant comme la Pluie, noyant l’Esprit et le faisant fleurir. . .
Pense à Artaud
Antonin Artaud 
Le conjurant :
Le Visage de mes hallucinations
Les traits aigus, creusés par la Souffrance
Le Rêveur-Homme, Diabolique et Innocent, Fragile, Nerveux, Puissant
-
Des que nous yeux se Rencontraient
Je plongeais dans un Monde Imaginaire
ARTAUD
Artaud Hanté, Artaud Hantant
J’ai lu quelques pages de son livre
L’ART ET LA MORT
Et j’y trouvais une extraordinaire Gémellité
ARTAUD
Frère en Phantasme et en Style
-
Visage affamé, audacieux
Visage ravagé de la Méchanceté, la Passion, la Violence
J’avais Peur de lui Parler
Pourtant il était gentil
Nos yeux se croisaient sans cesse
Ses Yeux profonds, son Regard visionnaire
-
Oh, Artaud !
Souffrant des Secrets Fiévreux de notre temps
De sa Misère et son Désespoir
Ce Monde déjà en Pagaille et encore au Départ vers l’Incertain
Dans la Nuit de l’Inconnu
Sans Pitié ni Justice pour Personne
ARTAUD ?
C’est l’Insurrection, c’est la Rébellion sans pareille
C’est LA GUERRE et LA MORT et L’AMOUR
L’immigrant a déjà laissé tombé la jupe rouge, remit le chapeau extravagant sur le pied du micro devant lui et glisse avec sa lampe au front derrière la statue d’Artaud, souffle lui son nom à l’oreille et commence à parler :
ARTAUD !
-
Et ce fut le Pont de Grande Nuit
Et il n’y eut plus que l’Amour :
Héloise au manteau, Abélard à la tiare, Cléopâtre à l’aspic(?), toutes les Langues de l’Ombre, toutes les Étoiles de la Folie
Ce fut l’Amour comme une Mer, comme le Péché, comme la Vie, comme la Mort
L’Amour sous les Arcades, l’Amour au Bassin, l’Amour dans le Lit, l’Amour comme le Lierre, l’Amour comme un Mascaret
L’Amour aussi grand que les Contes, l’Amour comme la Peinture, l’Amour comme Tout/ce/qui/Est
-
Du fond d’une Ivresse insondable une Lumière de
Fin du Monde remplit peu à peu ma
Pensée
Et il n’y eut bientôt plus qu’une immense Montagne de glace
Sur laquelle une Chevelure blonde pendait
L’immigrant glisse avec sa lampe frontale derrière le pied du micro avec la jupe rouge en soie, se met le chapeau seulement :
Ses Yeux . . .
Au moment où les Paupières se baissent, les Pupilles fuient vers le haut et je ne vois plus que le Blanc. Les Paupières tombent sur la Blancheur, un geste lent de Chair, et je me demande
Où sont passés les Yeux
De l’Homme qui a inventé de Nouvelles Dimensions
Dans le domaine des Sentiments, de la Pensée, du Langage
Je suis Ensorcelée par son Imagination
Et j’ai clairement l’impression de/me/Jeter/sur . . .
Dans la nuit avant Notre Premier Rencontre j’ai rêvé
Qu’il m’a Prise !
Quelle Passion . . .
Pourtant
Dans mes rêves je dors avec tout le monde
C’est là ma véritable – et inconsciente – amoralité de femelle
L’immense et implacable volonté qui m’empêche
De passer à l’acte, n’est qu’hypocrisie
L’immigrant remet le chapeau d’Anais sur le pied du micro, glisse derrière Artaud, enthousiasmé :
À me faire croire que les Miracles sont dans ce Monde, si je ne pensais pas que ni vous ni moi ne sommes tout à fait de ce monde, et c’est Cela, cette rencontre Trop parfaite
Qui me Stupéfie et m’Affecte . . .
Comme une Douleur
-
Plusieurs choses nous Rapprochent, Terriblement
Mais surtout:
NOTRE SILENCE !
Vous avez le Même Silence que moi
Et vous êtes la Seule Personne devant qui
Mon Propre Silence ne m’ait pas gêné
Vous avez un Silence Véhément où l’on dirait
Que l’on sent passer
Des Essences
Je le sens Étrangement Vivant
Comme une Trappe ouverte sur un Gouffre
Où l’on sentirait le murmure silencieux et secret de la terre
Nous sommes Deux Âmes Perdues dans des Espaces Infinis
J’avais senti passer Ce Silence mouvant
Qui me parlait et aurait été capable de me faire sangloter
De joie pure . . .
Je ne m’étais pas attendu à retrouver ma Folie en Vous
La lumière la lampe frontale reste un petit moment au visage de la statue et maintenant l’immigrant glisse à droite de la statue, prend le bonnet du KZ, le met sur sa cagoule et commence à chuchoter comme s’il était poursuivit
L’immigrant:
Je viens de Loin, de très Loin
Je Fuis et je Fuis depuis des jours et des jours
Je suis en Fuite et j’ai Faim, follement Faim
J’erre à Paris, je dors sur un Bancs dans un parc ou sous l’arcade
D’un Pont sur la Seine et je rêve et je rêve mon cauchemar de
DACHAU DACHAU DACHAU
Le Premier Camp de Concentration provisoire
Depuis Hitler au Pouvoir
DACHAU et les Matraques sur ma Tête
DACHAU et les Bottes dans mon Visage
DACHAU et le Barbelais dans mes Mains, mon Ventre
Et les livres, tous ces Livres Brûlants dans les rues de Berlin, Munich et Hambourg
Et le Dictateur Sanglant qui aboit par les Hautparleurs
Qui hurle dans mes Oreilles sous l’arcade du Pont Neuf
Où je me Cache et je ferme mes Yeux
Et devant mes Paupières marchent des Hommes en Colonnes
Des Marionnettes, des Squelettes au Command des Fins Fils de Fer
D’une Musique Militaire, Musique des Chefs d’Orchestres
De la Mort en Masse
-
Ceux qui ont brûlé les Livres, vont brûler les Hommes
Je le Vois, je le Vois
Je vois ce que les gens ici ne veulent pas voire
J’entends ce que les Parisiens n’entendent pas
Le Monde s’enflamme, le Monde s’enflamme
Et moi j’y peu rien, et moi j’y peu rien, rien
L’immigrant remet le bonnet sur le pied du micro et glisse derrière la statue 
d’Artaud :
Anais !
J’aime votre vivacité, votre maniére d’ondoyer, de vibrer . . .
Je veux de vous des Étreintes Violentes
Je veux entrer en Vous
Reposer en Vous
Sentir cette Vibration Pleine
Qui fait venir au Jour les choses de l’Esprit
Une Nécessité Violente qui nous dépasse
Qui vous Pousse vers moi
Le Noir glisse derrière le pied de micro d’Anais, reprend le chapeau et répond,
angoissé :
Vos Mots me donnent le Vertige
J’ai peur, comme on a Peur des mythes
On voit Trop des choses, des visions implacables
D’une acuité intolérable
-
Mais moi, je vis bien avec mes cauchemars
Vous en souffrez
Ils vont vous tuer !
L’immigrant remet le chapeau sur le pied de micro et glisse derrière la statue d’Artaud,
ravis :
ANAIS
Prêtresse des Incas
Nouvelle Espèce d’Enchanteresse
Princesse des Serpents à Plumes
Oh, votre Plumage, votre Fluidité
Si douce et si fragile . . .
-
Vous m’avez Ensorcelé !
Vous aller Ensorceler le Monde entier
Le l’immigrant saute derrière son pied du micro, prend le bonnet-KZ et parle, amèrement :
Ensorcelé sont-ils Tous, Tous
Dans ce Monde affamé et la Folie court, court
Moi, hier encore au Camp de la Mort
Aujourd’hui déjà au bord de la Seine
Et finalement, ce hasard magique
Ce soir comme tous les soirs je me couche sous mon Arcade dans mon lit de carton, les journaux ma couverture . . .
Et qu’est-ce que je vois dans la lumière d’une demi-lune?
Un couple d’amour pas loin de mon dortoir
Ils m’aperçoivent à peine et ils se parlent et ils se . . .
Ah, mon rêve, mon rêve romantique de Paris
Comment Dormir comme ça ?
L’immigrant avance un pas, et, mains sur le dos, s’adresse au public :
Vous me ne connaissez pas encore, mais
Je suis un homme Discret
Mes amis, ils me connaissent
Mais eux aussi ont perdu leur domicile
Mais moi, en tous cas, je n’Espionne Personne
Je ne suis pas une Punaise
-
MAIS
C’était TROP !
ÇA M’A FORCÉ !
Et j’ai bien prêté mon oreille . . .
L’immigrant passe furtivement derrière la statue, prend le chapeau d’Anais et s’approche tout près à Artaud et chuchote :
ARTAUD !
JE VOUS AI VU MOURIR
Ce soir pendant votre conférence à la Sorbonne sur
« Le Théâtre et la Peste »
L’immigrant recule, s’arrache le chapeau et chuchote à lui-même  :
Artaud ?
Qui ça, Artaud ?
L’immigrant rapproche, remet le chapeau :
Vous Mourez devant mes yeux, Artaud
J’étais prise de vous
J’étais Prise par la Mort de la Peste
Mes yeux s’Élargissaient, mes Muscles crampaient et mes doigts s’écartaient avec les vôtres
Nous Mourions ensemble
Mon Palais séchait, mes Intestins brûlaient
L’immigrant enlève le chapeau d’Anais et passe avec sa lumière derrière Artaud
ANAIS !
Vous m’avez éclairé
L’immigrant, encore perplexe :
Anais ?
Qui ça, Anais ?
Drôles d’Oiseaux, ces Deux Pigeons d’Amour-là !
Artaud :
Anais, je vous avais réservé une place, tout devant, dans la première rangée, prés de moi
Et vous m’avais regardé tout droit dans les yeux
Avec vos yeux lumineux de l’Orient
Rien à faire, trop fort, trop fort
Fini le Conférencier, Signal de l’Acteur  
Il n’y avait que Vous et Moi et la Mort
-
MAIS
Pendant que le public sur les bancs derrière
Riait / Sifflait / Hurlait
Pendant que les portes de l’auditorium claquaient
Je mourais
-
JE RENAISSAIS !
KATHARSIS, ANAIS
KATHARSIS
-
Lumière sur Anais, sa mini-jupe rouge en soie, ses jarretelles et l’immigrant se met son chapeau fou sur la cagoule :
Tu es Tombé par Terre
Tu t’es relevé
Tu es venu tout droit vers Moi
Tu m’a baisé la Main
Artaud et Moi
Je voulais embrasser le Monde
Qui est redevenu beau
Beau comme la fine Pluie dans la quelle nous sommes partis
-
Pour nous promener au bord de la Seine
Près qu’elle nous porte à la Mer
-
Lumière sur Artaud, derrière lui le Noir sans Chapeau, Artaud en
colère :
Les gens veulent rester en paix
Les gens ne veulent que l’OBJEKTIF
Ils veulent la catastrophe, mais loin, en IRAN ou Ailleurs
La Guerre doit rester dehors, comme le chien devant le Boucher
Mais la Guerre n’est pas un chien, elle ne se laisse pas attacher
La Guerre est un Dragon Déchainé
Un énorme Lance-Flammes Furieux
Courant sur Mille Pattes autour du Monde
-
Les gens ne veulent que l’objectif, que le PAR-DESSUS
Jamais le DEDANS
Ce soir ils sont venus pour entendre quelque chose SUR la Peste
Mais moi, je voulais leur donner la Peste Tout Entière
La Peste en Personne
La peste dans leur Main
La Peste sous leur Peau
La Peste dans leurs Muqueuses
Pour que la Peste les mange de l’Intérieur
REVEILLE !
DEBOUT !
OUVREZ LES YEUX !
REVEILLEZ-VOUS, AVANT LA CATASTROPHE !
FAITES QUELQUE CHOSE, CHANGEZ LES CHOSE, LE MONDE
CHANGEZ VOUS-MEME !
QUITTEZ VOS SIEGES, CES SIEGES DES MOITIES MORTS
-
ANAIS 
SŒUR D’ESPRIT !
NOUS CRÉONS LE NOVEAU MONDE
CRÉONS, RECRÉONS-NOUS
LE NOUVEAU, LE TOTAL NOUVEAU !
Maintenant l’immigrant tient son micro entre les Deux, ils forment un Duo, tête à tête
Anais :
PRIMAVERA
MANANA DI PRIMAVERA
Réveil Du Printemps :
Les fleurs fleurissent, les jus montent, l’Amour partout maintenant
Artaud :
Les gens ne savent pas qu’ils sont aveugles et sourds et tièdes et indifférents et . . .
Anais :
Printemps, Été, Chaleur, Lumière
Feu Divin
AMOUR !
Artaud :
Les gens sont Commercialisés, Corrompus
Assourdis par la Radio
Aveuglés par les journaux, ces masses de papier alourdis du Plomb
Paralysés et Humiliés par le Médiocre
Fatigués par le Confort
Baisés par la Mort
LA VOILÀ, LA PESTE MODERNE
C’EST ELLE : UNE ÉTRANGE DICTATURE
Plus calme :
Anais !
Ce que je Pense vraiment
Ce que je n’ai jamais Expliqué à personne :
Avec la plupart des gens on peut à peine parler sur des Idées, mais pas du tout d’ou elles nous viennent vers nous et encore moins de l’a l’Atmosphère dans la quelle ils Naissent, les Mots
Tous ces mots qui crèvent au mi-chemin vers nous
Oh, cette essence qui s’en fuit
Quand nous cherchons à les habiller, ces mots
C’est pour Cela que je fais du Théâtre
Écrire ne me suffit plus
Il vaut mieux mourir comme moi ce soir à la Sorbonne
Que mettre les mots en ordre
Ce soir je suis né de nouveau
DANS VOS YEUX
ANAIS !
Anais :
Artaud !
Comme vous Luttez pour vos Mots
Vous me Touchez au Cœur
Votre hyper-sensualité engendre une énorme tension créative
MAIS, ARTAUD
Que je vous le dise :
IL ME MANQUE QUELQUE CHOSE CHEZ VOUS
LA CAPACITÉ DE VOUS RÉJOUIR, D’ÊTRE BIEN AISE DE . . .
Réjouissons-nous le Printemps maintenant
Notre Printemps de l’Année Trente Trois
Soyez Heureux d’exister, d’être Là, ICI avec Moi !
Moi, je suis à l’aise dans mon Monde de l’Esprit, des Rêves
Des Visions et des Hallucinations
J’en suis contente !
Même les cauchemars les plus atroces . . .
Dés que je les transcris dessus, je ne les crains plus
Je les ai Bannis !
Artaud, soupire :
Ce soulagement, je l’ignore
Ces régions que je touche en Moi et que je fais naître par ma langue
Elles ne me satisfont pas
Très bas :
ET
Je dois vous confier quelque chose :
Les gens disent que je suis FOU, mais je ne le suis pas
Mais j’ai Peur, Peur de le devenir
Peur de ne plus jamais pouvoir ni parler, ni écrire
Anais, très prudent :
Mais est-ce que ce n’est pas pour nous Tous comme ça ?
Ne Luttons-nous pas Tous contre la menace de ne plus articuler ce que nous sentons et pensons ?
Artaud, sombre :
Si nous sommes tous les deux nés sous la Même Étoile
Vous, Anais, vous écrivez dans la Joie
Alors que moi dans la Souffrance
LÀ, l’immigrant se met son bonnet-KZ sur la tête et parle en direct au public :
À ce moment là
Un bruit m’a réveillé soudain de la transe où m’avait plongé l’écoute de cet étrange dialogue d’amour :
Un drôle de Tapage, comme si des Livres Tombaient mollement par terre
Mais je ne voyais rien à l’Ombre de l’arcade du pont
Seulement, d’un coup :
Deux mains miraculeusement blanches
Se posèrent dans la lumière de la demi-lune sur les épaules
De ce Type, appelé Artaud
L’immigrant enlève son bonnet, remet le chapeau d’Anais et dit :
Mais non, Artaud, mais Non !
Votre Vie Intérieure est Si Riche que la vie ordinaire vous Torture
Combien d’entre nous sont devenus coupables
De ne pas avoir été Eux-mêmes
Mais pas Vous, Artaud, pas Vous !
Et je sens cette Détresse
Qui vous envahit dans vos Nuits Solitaires
Et j’ai Pitié de Vous
Artaud, tiré par un fils de nylon invisible, tressaillit, Anais
s’effraye :
Mais non, pas ça non plus, Artaud
Je veux Guérir, vous Guérir
Guérir et Libérer !
Je vous Aime, Artaud
J’aime le Génie en Vous !
Artaud tressaillit encore plus fort et dit :
Oui, Oui !
C’est-ce que vous m’avez écrit, vous l’avez écrit bien souvent à d’Autres
Anais, outrée :
JAMAIS !
Jamais je ne l’ai avec autant d’ardeur, même pas à Djuna Barnes ni Henry Miller
Artaud, tremble de colère (fils de nylon !) :
MILLER !
Ce Salaud !
Ce Salaud qui nous à réveillé les démons de la Sexualité
Plus jamais Miller
Plus jamais un mot sur ce Salaud
Anais, apaisante :
Antonin, je vous en prise
Écoutez-moi :
Entre Nous, entre nous Deux, il y a une liaison unique
Des Fils tenus mais forts entre Nous
Des Fils du Destin au-quels nous sommes Pendus et Tendus
Nous vivons sans Filet !
Qui va jouer avec ÇA ?
Nous, nous ne jouons pas à des jeux d’enfants
Artaud
Artaud, calmé :
J’avais Peur, Anais
Peur de m’être trompé sur Vous
Peur que vous soyez une des ces femmes plus ou moins passionnées De la littérature qui s’amusent et se moquent de moi
Solitude, trop de SOLITUDE !
Anais, soulagée :
C’est fini ça !
Vous n’êtes plus Seul
Nous sommes Unis, Spirituellement Unis sommes nous
L’immigrant, avec son bonnet-KZ, direct au public :
Et LÀ, mes Dames et Messieurs !
Je n’y croyais plus, franchement :
Chuchotant :
Ils s’embrassèrent !
Pas trop longue quand-même
Et ils montaient légèrement et visiblement heureux sous le croissant de cette lune de printemps les marches de l’escalier en haut, en haut
Et là, voilà
Vous vous demandez peut-être
Pourquoi moi, pourquoi je me suis levé au lieu de me coucher et tomber dans le sommeil juste ?
Comme si j’avais assez dormi
Mains non, rien à faire, je me suis levé et je les ai suivis
Comme un Malade, un Obsédé
Succombé à la Tentation d’une Curiosité irrésistible
Et comme ça, Mesdames et Messieurs
Je suis devenu, finalement, un Persécuteur moi-même
Moi, le Persécuté
Pris d’amour fou pour ce Couple Étrange
Et je les ai Poursuivis tout droit dans un Bar
Un Bar avec un drôle de Nom, rendez-vous compte :
LA COUPOLE !
Et là dedans, qu’est-ce qu’il y a avait comme monde
Et l’air était lourd de fumée des cigarettes et des cigares
Mêmes les dames en avaient à la bouche
-
Personne ne s’occupait de moi
C’était, comme si je n’existais pas
Très bien, comme ça c’était facile de passer derrière mon drôle de couple je me suis placé dans leur dos
Leur discours amoureux se faisait de plus en plu intense
Leurs voix étaient encore plus fortes, plus hautes et quand même pas facile á entendre, dans houhaha général
Mais Eux là, ces deux Amoureux Là
Quel Enthousiasme, quelle jolie Folie
Ils étaient tellement excités qu’ils se cherchaient les mains l’un de l’autre
Comme s’ils voulaient s’envolaient ensemble à chaque instant
Ils parlaient et s’embrassaient, se regardaient doucement, furieusement dans les yeux
Près à embrasser, à sauver le pauvre Monde autour d’eux
Ce globe, sauvé par deux petits pigeons . . .
Et leurs pages écrites
-
Bref :
Leur balbutiement d’amour m’a touché aux larmes
Est-ce que je riais ou est-ce que pleurais ?
Je ne sais plus
Commence à chanter, doucement :
Freude schöner Götterfunken
Tochter aus Elysium
Diesen Kuuuss, der Millionen
Und so weiter und noch mehr . . .
-
Ils buvaient l’amour de leurs lèvres
Fou moi-même de cet amour fou, j’oubliais complètement
Ma propre situation d’un Sans Abris
Ma faim, mon dortoir sous l’arcade de la Seine
Et je m’endormais presque, caché dans leur dos
-
Soudain
Leur ton, l’atmosphère changeait
L’immigrant entre les Deux, en tenant son micro devant Lui et
Elle :
Attention, Artaud !
Je suis une Sorcière
J’enchante les hommes
Je suis un poison

Qui ne s’infiltre pas seulement dans la chair
Mais qui atteint des couches plus profondes
Lui :
Fais-le !
Empoisonne-moi !
Hétaire des Incas
Serpent d’Afghanistan
Mords mon Corps, mon Cœur, mon Âme, mon Tout
Pour que je puisse mieux t’Écraser
Crucifier
Faut que je te Tues, Anais
Elle tressaillit (fils de nylon !), Lui, la calmant :
N’ai pas Peur, Anais
Je ne suis pas Fou du tout
JE T’AIME !
Elle, crie presque :
Mais Si, Si Si
TU L’ES
Tu es FOU, FOU tu es !
Je t’Aime parce que tu es FOU
J’Aime la Flamme de ta POÉSIE, de ta FOLIE
Et je la sens déjà, cette flamme comme elle lèche ma peau, Artaud
Comme elle rentre sous ma Peau, me pénètre tout au fond, ARTAUD
Elle chante :
I’ve got You under my Skin
-
-
Artaud, lasuppliant :
ANAIS
Apele-moi
NANAQUI, NANAQUI
Comme ma Mère m’appelait
Anais, enthousiasmée :
NA/NA/QUI !
TOI MON TYRAN
TYRANNIE D’ESPRIT
TYRANNIE D’ESPRIT
Artaud, hors de lui-même :
A/NA/HI/TA !
MA DÉESSE
MA DÉESSE PERSANNE DE LA LUNE
T’écraser, te Tuer dans mes Bras
Il tremble de tout son Corps (fils de nylon)
Fuir !
Je dois fuir, je dois te fuir
SORCIÈRE !
EKSTASE
DECHAINER DANS L’EKSTASE
MON AMOUR
MON GRAND AMOUR
-
L’immigrant se met sa casquette et dit, mains sur le dos, essoufflé :
Et LÀ
Je vois à travers la lourde fumée
Comme il pose sa main tout doucement sur le genou de sa déesse
Et maintenant, je vois
Comment cette Main blanche avec ses longs doigts blancs disparait
Sous la jupe rouge en soie
L’immigrant touche la mini-jupe !
Et Elle ?
Touchée, Troublée
Paralysée
-
Et LUI ?
-
Mes Dames, Messieurs !
Quelle Nuit unique au Printemps de l’Année 33
Éclairé par cette liaison étrange
MAIS
Qu’est-ce qu’il fait
LUI ?
-
IL FUIT, CE FOU !
Et je le vois fuir encore, ce Monsieur
Suivi par sa Dame
Je les vois courir où, Messieurs Dames ?
Pas dehors, pas dehors dans l’aube de Paris
Mais Non, Mais Non
Ils fuient, elle derrière lui, tout les deux en pleine panic
S’en fichant du Monde, criant leurs Noms d’Amour
NANAQUI / ANAHITA / NANAQUI / ANAHITA
AUX WCS !
Et je cours après
Pour aider, pour empêcher un crime
Une catastrophe
Mais je recule au dernier moment devant la porte qui donne sur le couloir des Cabines
Et j’entends
Anais :
Pas ÇA, Pas ÇA !
Artaud :
Mais Quoi, mais QUOI ?
Anais :
Je t’aime ton GÉNIE
Artaud :
Mais je suis un être Humain !
C’est monstrueux, ce que vous attendez d’un Homme !
Anais :
Oublies moi, Oublies moi comme Femme!
Artaud :
Oublier Toi ?
Oublier la Prêtresse des Incas ?
Moi, oublier le Serpent plumé ?
Moi je dois te Posséder, t’Écraser, te
Crucifier
Pour que nous réveillions LE MONDE ensemble
NOUS GUERIRONS TOUS LES MALADES DE LA PESTE MODERNE
NOUS SURVIVRONS LA CRISE MONDIALE
DÉLIRE DE L’AMOUR
DÉLIRE DES ÉNERGIES COSMIQUES
LAISSONS TOMBER NOS MASQUES
LAISSONS TOMBER TOUS NOS VÊTEMENTS
ACCUSONS LA PERFIDIE HUMAINE
FINNISSONS-EN AVEC L’HYPOCRYSIE DES CITOYENS
REGARDONS-NOUS NOUS-MEMES
TOUT DROIT DANS LES YEUX :
-
AVANT QUE NOUS NOUS LES ÉCRASONS, NOS YEUX
OH, LES TIENS, TES YEUX
ANAIS, TES YEUX . . .
-
L’immigrant s’eloigne d’Artaud, reste derrière son micro, reprend sa casquette et :
Et Là
Plus de Mots
Que des Gémissements et des petits Cris étouffés . . .
Je ne pouvais Plus
Je devais InterveNir, EmpêCHer :
Un Meurtre d’Amour s’Accomplissait
Et j’ai poussé la Porte
ET
Qu’est-ce que je vois, qu’est-ce que je vois
Mes Dames, Messieurs ?
-
Artaud à Genoux, devant Anais
Lui mordant le ventre, les seins, les mains en vain
Il battait sa tête entre ses cuisses
-
Et Elle
Les yeux fermés, le dos contre la porte d’une cabine
Ne se défend plus, se laisse faire, se laisse faire un petit moment
Jusqu’à la seconde où il se lève
Où il baisse ses pantalons, ses sous-pantalons . . .
Et LÀ
ELLE ROUVRE SES YEUX ET LE VOIS
LUI DEVANT ELLE
DEMI NU
NULLE
RIEN
-
Et quoi encore, Messieurs Dames ?
Rien, Mesdames et Messieurs !
ABSOLUMENT RIEN !
L’immigrant sans casqette, entre Artaud et Anais
Artaud, froid et dur :
VA-T’EN ! VA-T’AN !
Il crie :
VA-T’EN !
-
Anais, très doucement lui séchant avec son mouchoir la sueur du front :
Mais pourquoi, pourquoi ?
Pourquoi m’en aller Maintenant ?
Artaud, en se retirant les pantalons :
Maintenant ou plus tard
TU ME DÉTESTERAS !
Plutôt, á lui-même :
Trop d’opium !
Anais, presque joyeuse :
Détester ?
Te détester ?
Pourquoi te détester toi, Antonin ?
Elle essaye de lui fourrer sa chemise noire dans ses pantalons noirs, mais Artaud recule et dit, violement :
Mais OUI!
Parce que c’est très Important
Pour Toutes les femmes c’est très, très important !
Anais, firme :
Mais Non, pas moi !
Je ne suis PAS obsédé de la Possession physique
Je ne désirais PAS l’amour corporel
Je désirais ton amour Spi/ri/tu/el
Antonin
-
Oublions, c’est passé
Hais-moi, si tu veux !
Tu as raison aussi :
J’ai trop jouée le jeu de la séduction
Jouer à rendre les hommes fous
À posséder non seulement leurs corps mais aussi leurs âme
J’exige plus que les putains !
L’immigrant reprend sa place derrière son micro et parle au public :
Et alors, à votre avis
Qu’est-ce que passa-t-il ensuite ? 
Entre nos deux Chéris 
-
Je vous le dise ? 
Et alors je vous le dirai :
Bras dessus Bras dessous, ils quittèrent La Coupole
Et, enjoués, éméchés, enivré
Par leur première et dernière nuit d’amour
Ils prenaient, quel hasard encore
Ils prenaient mon chemin habituel vers le Pont Neuf
À l’aube du printemps à Paris dans l’année
Dix Neuf Cent Trente Trois
Il chant :
Paris s’éveille . . .
-
-
Et, tout en chantant, il emporte les trois pieds du micros tout à la fois, d’abord le sien, après celui d’Anais et finalement celui d’Artaud vers le Derrière
Reste Artaud
Tout seul
-
EPILOGUE
L’immigrant revient, va vers Artaud et lui parle :
C’est bien
Vous êtes là encore, Monsieur Artaud
D’ailleurs, vous serez toujours là
Aussi quand moi, je ne serai plus là
Alors causons maintenant un peu, entre hommes . . .
Mais non, pas de ça, pas de la Sexualité, ni de la Folie
Plutôt de votre Actualité !
Je pense à vos messages après la Guerre
Celui par exemple que vous avez adressé au Pape Pius XII.
Vous vous souvenez, bien sûr
De votre grande colère, automne de l’année 1946
Quand ce Pape-là se taisait encore sur l’Holocauste
Ce Père Sacré a gardé le silence sur le plus grand crime de l’humanité jusqu’en 1958 et l’a gardé jusque à sa tombe
Il vous a survécu de dix ans alors
Malgré votre Vision cruellement meurtrière
Vous permettez, que je vous la relise, Monsieur Artaud ?
Non ?
Où est-elle, d’ailleurs ?
Voyons voici, dans ce livre de vos ŒUVRES chez Gallimard
Il feuille et feuille et . . . finalement le livre tombe par terre et il dit, sobrement :
Pas de message !
Pas un mot de votre message à Monsieur Pacelli !
C’est quoi ça ?
Je vous entends mal, Monsieur Artaud
La censure, c’est la censure ?
D’accord, d’accord !
Mais quand même, je vous la lis ?
Je l’ai quand même, au moins traduit librement de l’Allemand de moi
D’une version que j’ai, encore le bon hasard, bien trouvé
Alors voici, votre vision, vers la fin de votre message :
Vous ne dites rien ?
Vous réfléchissez, je comprends
Écoutez entre temps :
Rodez, 1 octobre 1946 
Mais puisque je suis mort il y a deux mille ans déjà sur la croix, je vous le mets par écrit, que cette fois-ci on ne m’internera ni dans un asile psychiatrique ni dans un bunker ou autre chiotte de prison. Et ni ma conscience ni les mânes de la mort, que j’ai calmés, ne resteront tranquilles, avant que je vous ai fais grillé votre sexe dans le ciel, Pape Pius, avant que j’ai pendu votre sexe grillé dans le ciel . . .
Chapeau, Monsieur Artaud !
Je vous félicite de votre vision génialement juste
Et si je pouvais, je pendrais le sexe grillé de notre Pape actuel juste à coté de celui du Pape passé
Pourquoi ?
Vous me demandez ?
Ah oui, bien sûr, vous ne pouvez pas le savoir
Pourquoi le sexe du Pape Benoit XVI aussi devait être pendu
Grillé dans le ciel 
Je vous le dis :
Parce que Notre Pape a le culot de vouloir la Béatification de Votre Pape, au lieu de le laisser disparaître dans le Hadès de l’Histoire du Catholicisme
Imaginons, Monsieur Artaud :
Deux Pipes Frites Papiens 
Dans le pauvre ciel de notre pauvre Europe
Qui n’a rien dans les mains pour empêcher Auschwitz
Qui n’était qu’un bon hasard de la Guerre
Que du Bonheur de la Guerre
Autrement Auschwitz aurait trouvait sa Suite
Vous l’avez su ça, Monsieur Artaud
Vous avec vos Visions
Vous avez vu ça dans vos derniers jours à Rodez
Que nous n’y pouvons rien
Pour empêcher le nouveau style sur la tuerie des masses moderns
Ce style nous attend déjà sous les tapis et parquets
De nos salons de notre chère culture-chérie-chouchou
Culture Caca !
Notre Culture est de la Merde !
Vous avez raison, Monsieur Artaud :
Et cela malgré tous les programmes culturels et littéraires
Personne n’a voulu vous croire à l’époque
Et plus d’un demi-siècle après
Personne ne veut le croire encore
-
Tenez !
C’est quoi ça, là, dans votre mains, ce truc jaune là ?
Votre dernier manuscrit ?
Et vous l’avez écrit ?
Qu’on nous fait apprendre le ABC et le Un multiplié avec Un
Au lieu que nous apprenons comment survivre l’Holocauste Un
Deux, Trois
C’est ça, vous avez écrit ça, Monsieur Artaud ?
-
Montrez-le-moi, s’il vous plaît !
Non, vous ne voulez pas ?
Je comprends !
Pas encore prêt à être imprimé, d’accord
Je peux attendre
Mais c’est sûr, ça là, dans votre main gauche
Cela ne peut pas être votre message d’amour pour nous ici
-
Un tout dernier mot encore, Monsieur Artaud
Vous vous souvenez de cette nuit de printemps, l’année 1933 à Paris ?
Mais oui, vous et Anais à La Coupole, après la promenade le long de la Seine et la fameuse Conférence avant
Et dans les toilettes après
Pas beau, pas beau du tout
Sauf à la fin, vous deux réunis devant moi sur mon chemin vers le Pont Neuf
Et, d’un seul coup, vous avez du voir quelque chose dans l’eau
N’est-pas ?
Et vous vous êtes penché assez en dehors du mur du Pont Neuf
Drôlement longue, vous vous souvenez ?
L’immigrant imite maintenant comme les deux amoureux se sont penchés dangereusement sur ce mur, comme ils sont presque tombés dans l’eau
C’était comique, vous savez
Et personne n’était tombé dans la Seine
Et pas d’inondation du tout, pas d’arbres dans le courant
Aucune vache morte ni voiture, les quatre pneus en l’air
-
Et en dessous de vous coulait la Seine, susurrait le temps
-
Et vous, Monsieur Artaud, vous avez traversé le Pont
Moi couché dessous
-
J’écoute encore la mélodie de la Folie du Temps
-
L’immigrant laisse tomber lentement le micro par terre et :
KRACH !

Tout a commençé avec une statue : Antonin Artaud , créée par Nathalie Andrieu de fer, papier et acrylique, mesurant 180 x 7o x 20 cm. Pieds hésitants, maladroits mais sur terre, corps amaigris et noir comme les cheveux qu’il s’arrache, cet homme au visage blanc de craie qui tient dans l’autre main un manuscrit, inachevé, pas prêt à être imprimé. L’homme est fragile mais ses yeux noirs de charbon regardent loin, très loin. Mais qu’est-ce qu’il voit ? Il a des visions implacables, d’une acuité intolérable.
Eckhardt Momber est né en 1941 à Berlin, au centre d’une folie humaine. Son livre ‘s ist Krieg !(Y a la Guerre !), publié quarante an plus tard, suit la coulé du sang depuis 1914 jusqu'aux portes du fascisme allemand en 1933. Peu après il quitte L’Allemagne pour le Japon où il reste 20 ans en enseignant la langue et la littérature allemande surtout du 20ième siècle. À peine rentré en Europe il publie son conte Chinamesser(2005) et n’abandonne pas le thème de la violence humaine qui est également au centre de sa première pièce en Français La Nouvelle Ondine, réalisée au Festival du Théâtre de Rue d’Aurillac en 2009. Son essai Nostalgie de la Barbarie sur la peinture provocante de Gregory Forstner, publié dans la même année du Musé de Grenoble, reprend la violence actuelle avec ses filles éternelles.
Amour Fou 33, Court mais Drame d’Anais et d’Antoine, concentre le rencontre étrange d’Anais Nin (1903 -1977) et d’Antonin Artaud (1896 -1948) dans une nuit du printemps de l’année 1933. Deux ardents décadents, liés tragiquement dans le souterrain de l’histoire des années Trente, de leur désirs et leurs crimes. L’épilogue exemplifie encore la clairvoyance d’Anton Artaud dans une vision actuelle, un cri aigu contre le ciel d’aujourd’hui.

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Autour de Roudi

Roudi vit avec nous, ses amies les juments, les chats et les poules quelque part en Auvergne. Parfois Roudi me regarde avec un œil tellement humain qu’il me fait penser à Lucius, le pauvre, qu’on a transformé en âne, L’âne d’or d’Apulée ; vers 125 après JC. Bien que cet âne, le fameux héro du premier roman de l’Antiquité, et Roudi dans son pré, vivent dans deux mondes tout à fait différents, ils ont quand même une chose en commun : Ils observent tous les deux les comportements bizarres si non atroces des êtres humains. Et j’imagine qu’ils ont de temps en temps envie de s échapper, de partir loin . . . Comme cet âne que je pus observer au cours du printemps 2004, alors que je me trouvais à bord d’un porte-conteneur qui me ramenait en Europe, après 20 ans passés au Japon.

Alors que défilait comme en rêve, sous mes yeux, l’Egypte du canal du Suez, j’aperçus us un troupeau d ânes, dont l’un s’échappa pour foncer droit vers le désert. Le frère de Roudi ! Et son propriétaire jurait et fouettait son ânesse, petite sœur de la Modestine de Stevenson, et lui donnait des coups de talons dans le ventre pour la lancer à la poursuite du pauvre fugitif…

Me voici donc maintenant en Europe, mais c est seulement il y a deux ans que je me suis décidé, l’hiver 2008/9, à écrire dans la langue de mon pays d’élection. Qui sait ! Si je ne m’étais pas cassé la cheville devant ma porte cet automne-là, j’aurais peut-être continué à écrire en Allemand. Et à vrai dire, j’ignore encore aujourd‘hui si quelqu’un, dans l’océan de Google, peut s’intéresser à ce que j’ai écrit et continuerai à écrire.