Eckhardt Momber, avec
la collaboration de Geneviève Momber
GRAND-PÈRE
N’ÉTAIT PAS NAZI!
Et ses petits enfants . . . ils ne le
seront jamais?
Conférence
de l’Université Inter- Ages à Aurillac, le jeudi 30.1.2014
(Version écrite)
Grand-père n’était pas
Nazi !
Point.
Une phrase courte mais pas simple. Quelque chose ne va pas, ne me plaît
pas. Je me méfie. Pas vous ?
Si grand-père n’était pas Nazi, qui l’était ? Hitler ! Bien sûr. Hitler,
Himmler, Heydrich et . . . . Mais oui : Heidegger aussi ! Heidegger le
grand philosophe, pour beaucoup le plus grand philosophe du 20ième
siècle. Lui aussi était Nazi, comme le prouvent ses Cahiers Noirs[1] récemment publiés. Est-ce qu'il était
aussi antisémite ? On se le demande aujourd’hui.
Peu de gens seulement étaient de vrais Nazis enrôlés dans la NSDAP, le
Parti National Socialiste des Ouvriers. La majorité de la population était
profondément séduite ou suivait, résignée ou terrorisée. Les hommes, les
femmes, les adolescents – aucune classe ni couche sociale n’était éloignée du
Nazisme. Les industriels, les académiciens,
les médecins, les artistes, les banquiers, les boulangers, les juges, les
notaires, les diplomates, les . . . tout le monde baignait dans la pensée Nazi
dont l’antisémitisme était le cœur. Sauf
tout de même les
résistants, déserteurs qui payèrent souvent leurs actions ou simples gestes
pour dire Non de leur vie. Mais après la défaite, personne ne
voulait plus être Nazi et ne se sentait
ni responsable ni coupable de ce qui s’était passé.
Les responsables n’étaient pas juste Hitler et sa clique criminelle. Ce
serait trop simple. C’est vraiment complexe et il ne faut surtout pas
simplifier parce que le Nazisme dans ses formes modernisées est encore là dans notre
société permissive et décomplexée qui, comme l’écrivain Marek Halter[2] l’a dit,
« prépare le terrain à la recherche de boucs émissaires ». Der Schoß ist
fruchtbar noch ! Le ventre est encore fécond ! Disions-nous après la
guerre en Allemagne. Alors: si grand-père n'était vraiment pas nazi, qui
l’était donc ? Et qui le serait aujourd’hui ? Sans le savoir peut-être.
Nos petits-enfants, leurs cousins et cousines ? Est-ce qu’ils sont
vraiment protégés des idées racistes et
antisémites? Est-ce qu’ils le seront encore dans l'avenir? Je n’y crois
pas trop! Et pourquoi ? Aussi parce que non seulement
le coût de la vie explose dans beaucoup de pays, mais les inégalités
aussi. Il semblerait que les 85
personnes les plus riches du monde possèdent autant d’argent que les 3 milliards
de personne les plus pauvres de la planète. C’est cette explosion des
inégalités aussi qui menace la démocratie de l’avenir. Ajoutons à la crise
actuelle une crise du climat, de l’énergie de plus en plus, le manque d’eau
potable bientôt à la pauvreté dans les
banlieues des grandes villes, et nous
pouvons craindre des révoltes chez nous aussi et pas seulement en Afrique.
Pendant qu’on chasse et juge encore les derniers vieux Nazis et
criminels de la dernière guerre mondiale en Allemagne, de nouvelles guerres se
préparent dans le monde, les guerres de religion et de climat. À
Cologne par exemple un certain vieux Monsieur est accusé d’avoir participé aux
meurtres d’Oradour[3], pendant que de
nouveaux criminels pour moi bien
semblables au Nazis, se sont mis en route. Et après avoir commis des actes
barbares, certains nous diront qu’ils ne
sont pas responsables et qu’ils étaient
forcés de tuer, forcés par leurs chefs, leur groupe, les conditions politiques,
qu’ils ne savaient pas etc. On a même un chef d’état syrien qui nous
affirme qu’il ne fait rien de mal en ce moment-même et qui se présente
tranquillement aux prochaines élections, alors qu’il a déjà . . . combien de
morts sur la conscience ? Il ne s'excusera pas, comme ce vieux soldat allemand
à Cologne d’ailleurs, qui n'est jamais
revenu en France parce qu'il a honte mais qui ne reconnaît toujours pas avoir
participé activement au massacre.
Pourquoi ? Parce qu’il n’a pas encore, 70 ans après le massacre
d’Oradour, la notion d’une vraie culpabilité
personnelle. Assad par contre n'hésiterait pas je pense à nous rendre visite,
comme un certain Kadhafi à une certaine époque ... Restons avec cet Allemand de l’âge d’un grand-père qui était
très jeune à l'époque, jeune comme ces jeunes Anglais, Français et Allemands
qui à 15 ans parfois quittent leurs familles, leur pays pour s’engager comme
djihadistes, comme de nouveaux Nazis, je dirais. Pleins de haine, prêts à tuer.
Mais avant leurs actes il y a les mots. Les mots en ce moment, ils courent les rues
et les réseaux sociaux, il y a les mots de Dieudonné et de beaucoup
d'autres. Et c’est Marek Halter encore
qui nous cite Pascal : Nous parlons et nous sommes ‘embarqués’ !
Pourquoi ce nouveau racisme qui repousse à partir du vieux ??
Peut-être parce qu’il y a cette
grande misère de la jeunesse, le chômage,
la peur, la peur pour leur avenir des jeunes et des vieux aussi, dans les grandes villes d'Europe comme
ailleurs. C’est quand même le candidat Républicain à la présidence américaine
dans deux ans, Mario Rubio, qui se demande si les Américains ne sont pas
revenus au capitalisme des années 1920 à cause du simple fait qu’en 2012
« 10% des Américains les plus
riches se seraient partagé près de la moitié du revenu national, et ceux du
fameux 1% du haut de la pyramide quelques 22%. de ce revenu.» Oui oui,
mais c’est l’Amérique, pas nous, me direz-vous, pas la France ! Mais est-ce que nous sommes vraiment mieux
protégés en France qu'aux États-Unis contre les dangers des inégalités ?
L’éditorialiste Alain Frachon se le demandait récemment dans Le Monde, et Il
conclut : » Les écarts de revenus, la polarisation sociale ont sans
doute un impact profond – sur la croissance, sur l’équilibre politico-social,
sur la démocratie (émergence de forces politiques protestataires).[4]
Voulons-nous
vraiment ce retour au 20ième siècle ? Où des sociétés entières
et non pas juste celle de l'Allemagne nazie sont tombées dans l’abîme des
atrocités inhumaines en oubliant toutes les valeurs d’une culture occidentale
éclairée, d’une culture avec ses références à la Liberté, l’Égalité et la Justice, la Fraternité entre
êtres humains. Et nos frères et sœurs
juifs, où ont-ils fini avec leurs enfants ? A Auschwitz, à Theresienstadt
et ailleurs. À cette occasion: tous ceux qui nient l’Holocauste, les vieux
Nazis et leurs petits-enfants, leurs neveux et leurs nièces, doivent être
empêchés à tout prix de le nier ou de le mettre en question, que ce soit en
plaisantant ou pas.
Bravo, Monsieur le ministre de l’intérieur de la France! Et Merci aussi, de la part d’un Européen vivant en France. Pourquoi ?
Vous savez qu’en Allemagne on n’arrive toujours pas à interdire le parti
Neo-Nazi, la NPD ?
Quand j’ai commencé à réfléchir à ce que j’aimerai vous dire ce soir, je
me suis rendu compte qu’on sera plutôt entre nous, des grand- pères des
grands-mères, des pères et des mères. En l'absence de nos enfants et petits
enfants ? C’est bien dommage ! Parce que ce sont eux qui sont et
seront concernés de plus en plus par un avenir qui ne me semble pas trop rose.
Après nous le déluge ? Moi, je pense que je continuerai à vivre en eux et
en elles après ma mort par les idées et les actions de mon vivant. Alors je
prends la responsabilité de ce que je dis et je
fais maintenant.
En pensant comme ça, je me suis dit : Zut alors ! Hitler et
Staline enfin derrière, derrière nous aussi la SS, la Wehrmacht, la Gestapo. Le
KGB et la CIA par contre ne sont pas encore derrière nous. Et devant, devant
nous ? Où en sommes-nous aujourd'hui
avec la démocratie ? Est-ce que c’est déjà sa fin ? Puisqu' on parle
de la post-démocratie ? Qu’est-ce que c’est çà, post ? Post veut
dire après, non ? Qu’est-ce que cela pourrait bien être, une
démocratie après la démocratie ? Réponse de notre nouveau jeune
voisin : Eh bien, une Super-Démocratie ! Sympathique !
Malheureusement, il me semble, ce n’est plus ça.
Avoue-le ! Parle !
Est-ce que tu penses que nous glissons d'abord dans une barbarie douce
pour tomber plus tard dans une société vraiment
totalitaire? C’est ça ?
Dis-le !
Mais non, ce n’est pas ça, ni cela . . . ni . . . quoi alors ?
D’accord, j’avoue que je crains
que nous glissions peu à peu, très doucement dans la gueule d'un nouveau
monstre doux d’abord et horrible plus tard. Il y a des tendances, les médias
omniprésents et arrogants, les lobbies de plus en plus forts, que ce soit du
pétrole ou du nucléaire par exemple, une opposition de plus en plus molle, mais
la colère dans les rues et les bistros, cette colère qui fait croire aux gens
qu'il y a des solutions simples à une situation de plus en plus complexe. . .
et d'autre signes qui annoncent un système de moins en moins
démocratique et social qui pourrait nous contrôler comme autrefois, ou même mieux, plus élégamment, plus
discrètement, pourquoi pas virtuellement. D’abord ! Et ce régime
moderne-là, une fois tombé dans les mains des dictateurs, pourrait contrôler
totalement notre vie privée, nos relations sociales, nos idées sur la liberté,
sur la guerre, la paix . . .
La NSA, aujourd'hui, contrôle des pays entiers, des chefs d'Etats amis
au nom de la sécurité. Et autrefois ? Es war
einmal ! Il était une fois en France : La Famille, la Patrie, Vichy .
. .
Oufff !
Qu’est-ce tu deviens lourd !
T'es bien peureux, toi !
Tu ne crois plus à
une société libre, ouverte, démocratique, protégeant les femmes, les hommes et
les enfants ? Non, pardon ! Laissez-moi vous raconter ! C’était drôle : Un beau matin, à peine levé, je me suis dit : Punaise !
J’y crois plus ! C’était comme dans mon enfance quand j’ai cru avoir
compris que Dieu n’existait plus, mais plus fort encore. Et après ? Après
quoi ? Après Dieu ? Pas de réponse, pas ce soir! Maintenant juste
ÇA : Je ne veux pas mourir après
avoir disparu dans le brouillard de la consommation, dans le maelstrom du marketing de manipulation démagogique qui inondera ma petite voix
qui veut demander,
critiquer, s’engager, supporter la
liberté de la presse, Amnesty International, Sortir du Nucléaire, Occupy, et
même peut-être Pussy Riot . . . Est-ce que je dois accepter l’idée d’une
sécurité qui affaiblit ma liberté personnelle, espionne ma vie
privée, mes petits péchés, mes pensées
perverses . . . ?
Jamais !
Jamais je ne me laisserai prendre ma liberté personnelle ?
Et la liberté des autres ?
Non plus, jamais !
Tu te souviens de ta grand-
mère ?
Oui !
Qu’est-ce qu’elle t’a dit ?
De ne jamais dire Jamais !
Justement !
Sa petite liberté à elle a été supprimée
au profit d'une autre liberté plus
grande, celle qui a provoqué la première guerre mondiale, cette autre liberté
féroce, sanglante, plus forte que la liberté de la paix, la liberté de dire NON à la guerre. Une
guerre commandée par les grands chefs et
acceptée par le plus grand nombre, ce qui aboutit à un massacre inimaginable de
tous les belligérents.
Voilà la ‘Urkatastrophe’ du 20ième
siècle!
L'ancêtre de toutes les guerres qui ont
suivi.
Et le nid barbare de la barbarie du
Nazisme !
Et après ?
Tout de suite après en Allemagne, après
1918, il y eut un grand mouvement pacifiste, de gens qui non seulement pensaient mais scandaient : PLUS JAMAIS LA GUERRE !
NIE WIEDER KRIEG ! Partout dans les rues.
Et alors ?
Et alors, Hitler et la
deuxième guerre mondiale 20 ans plus tard !
Dont on connaît très bien les suites
macabres . . . trop bien même ? Peut-être ! On s’est habitué, on en parle trop vite, C’était affreux, oui. Et on n’y pense presque plus. On sait et on ne sait
pas. Finalement, ce qui est fait est fait...
Voilà l’Après !
Et l’Avant ?
J'aimerais revenir à cent ans en
arrière. Avec un nouveau bestseller en Allemagne qui provoque en ce moment un grand débat historique, et qui nous explique bien la
situation compliquée en Europe avant la guerre. Il explique moins le WARUM et
plus le WIE - Attention les étudiants d'Allemand de l’Université
Inter-Ages ! Christopher Clark[5] explique plus
le COMMENT que le POURQUOI de l’éclatement de la Grande
Guerre. Son best-seller s’appelle : The
Sleepwalkers, Les Somnambules (Die
Schlafwandler). Titre emprunté au romancier Hermann Broch qui avait publié
un roman sur la dévaluation des valeurs et idéaux de la société bourgeoise en
1931/32. Oui, vous avez bien entendu ! La première Guerre mondiale avait
commencé comme si les responsables étaient en état de somnambulisme, pas bien
clairs dans leurs têtes. Tout
cela commençait avec un attentat suicide
le 28 juin 1914 à Sarajevo, et 37 jours plus tard, la première Grande
Guerre était déclarée. Les documents et
les témoins présentés dans Les
Somnambules montrent bien que la
guerre éclata presque sans que personne
ne réalise qu'elle se transformerait en une boucherie
sans nom. Et après elle était là, la première guerre de tranchées,
interminable et meurtrière comme jamais. » L’éclatement de la guerre était
le résultat d’une chaîne de décisions, prises par des acteurs avec des buts
précis. Ces acteurs étaient jusqu’à un certain degré capables de réflexion personnelle, qui leur permettait de
choisir entre plusieurs options sur la
base des meilleures informations. »[7] Parmi les
empereurs, rois, ministres, ambassadeurs, militaires et fonctionnaires,
beaucoup avaient peur ou faisaient des prévisions pessimistes qu’ils
refoulaient. Et quand même, des centaines de milliers d'hommes furent
transportés dans des wagons à bestiaux jusqu'aux frontières nationales pour massacrer
ceux qui étaient souvent des paysans comme eux. Mais il est
vrai aussi que des Allemands se rendirent aussi coupables de crimes de
guerre en Belgique et dans le nord de la
France.[8]
Malgré cela, les chefs de la guerre et les guides des
opinions publiques dans tous les pays engagés se vantaient d’être sûrs, sûrs de la victoire
totale alors qu'ils étaient déjà responsables de centaines de milliers de
morts. S’il n’y avait pas eu Jean Jaurès, Karl Liebknecht, Rosa Luxemburg et
ces quelques hommes et femmes d’un courage civil exceptionnel autour d’eux, on
aurait dit que l’Europe n’était plus qu’un vaste repaire de
bandits sanguinaires. C’est cette arrogance, ce mélange de croyance folle de
ces donneurs de leçon qui m’indigne encore aujourd’hui quand je m'arrête un
instant devant l'un des milliers de monuments aux morts des petits villages, en France et comme en
Allemagne. Et au Square d’Aurillac aussi, nous pouvons lire au pied du grand monument de guerre : Si les voix des victimes n’ont
plus d’échos, nous sommes perdus !
Et aujourd’hui, qu’est-ce qu’on entend
encore, comme autrefois ? Que cela ne se répétera jamais. Qu’on est
devenus plus sages. Qu’on n'a même plus besoin de la guerre. Que les bombes
atomiques sont une arme de dissuasion et
nous garantissent la paix. Mais cela dépend de nos grands chefs,
non ? L’arme nucléaire, une fois qu’on l’a, elle est toujours prête à servir, si un jour la Corée du Nord
ou un autre pays décide de déclencher les hostilités par exemple. Un Conflit
reste un conflit, grand ou petit. Et il y en a toujours en France, en Europe et
dans le monde des conflits. Le conflit entre ceux qui sont riches et ceux qui
ne le sont pas ou ceux qui se croient plus forts ou meilleurs que les
autres. Ce n’est pas bon du tout, tout
cela. La jalousie, la haine, le racisme traînent partout, et la foule des
nouveaux Nazis nous attend.
Pour mieux vous faire comprendre mes
inquiétudes pour l’avenir, j’aimerais vous raconter un peu l’histoire de ma famille et de moi-même
pendant le 20ième siècle, l'histoire d'une famille qui a peut-être
traversé les périodes sombres de l'Histoire d'une manière assez semblable
finalement à une famille française...
Oh là-là !
Qu’est-ce qu’il va nous raconter
encore !
Pas trop lourd, pas trop lourd,
j’espère !
Justement pas !
Pour
égayer un peu notre voyage dans le passé, je me suis dit pourquoi pas
nous laisser accompagner par . . . des ÂNES!
Et vous allez voir tout de suite qu'ils nous aideront à mieux
comprendre, Ils sont tellement proches de nous, surtout quand ils nous sont
présentés par des artistes !
Qui a peint ce tableau
extraordinaire ? Johann Heinrich Wilhelm Tischbein (1751 – 1829). Tischbein,
l‘ami de Goethe et des ânes !Bon, ils ont l’air de ne pas aller trop bien,
ces ânes-là. Ils crient, ils crient de douleur et puisqu' ils ne sont plus dans
un grand pré, ils vont se mordre finalement à mort, serrés comme ils sont. Quel
surréalisme moderne! Pour moi, loin de l’époque de Goethe et de Tischbein qui
ont vécu les guerres de Napoléon, ces 5 ânes représentent les puissances de la
première guerre mondiale : l’Allemagne, la France, La Russie, l’Autriche
et l’Angleterre.
Combien d’ânes installerions-nous
aujourd’hui dans le nid de Tischbein ?
Mes grands- parents ont mis ma mère dans
le nid d’une première grande guerre comme mes parents m’ont mis, moi, dans le
nid d’une deuxième grande guerre. Pourquoi ‘grandes’ d’ailleurs ? Grandes
à cause de l’énormité des atrocités commises ? Je n’y suis pour
rien ! C'est le destin, un destin fatal. Mon ‘fatum’ ! C’est de là
que nous est venu ce mot d’origine latine « Fatal », c’est quelque
chose qu'on ne peut pas changer ou qu'on croit ne pas pouvoir changer. Au
contraire de ce qu'on peut essayer de changer soi-même. C’est en affrontant
cette contradiction que nous devenons ce que nous sommes, des personnes avec
chacune sa personnalité.
C’est un point important.
Nous y reviendrons!
Mais tout d’abord, voyons mon grand-père,
pour commencer l’histoire de ma famille. Mon grand-père avait 44 ans quand
Hitler a pris le pouvoir sur les Allemands. Quand tout le monde devait saluer
Hitler par ce geste grotesque d’un bras tendu à moitié vers le ciel – Merci,
Charlie Chaplin !- Et Bonjour les Quenelles ! – Lui, grand-père, se
contentait de soulever son chapeau. Le soir du 18i février 1943,
après la défaite de la Wehrmacht à Stalingrad, il alla écouter Goebbels dans le
fameux Sportpalast, le palais des sports de Berlin, fameux pour ses longues courses de vélos.
Goebbels dans un palais des sports ? Pourquoi ? Tout simplement parce
que, comme Hitler l’avait proclamé, le sport ne servait qu’ à une seule
chose : s'entraîner et se battre pour gagner !
Ce soir-là Goebbels demanda aux
Berlinois et aux Berlinoises de le suivre dans quelque chose qu’il appelait
« la guerre totale ». La foule, complètement envoûtée par ce grand
orateur, après avoir hurlée JAAA, Ouiiiiii (qu’est-ce que c’est proche ce cri,
proche du cri des ânes, leur : iiiiaaa !), la foule, affreusement
enthousiasmée par l’idée d’une guerre totale et sans imaginer les conséquences
mortelles qui en résulteraient pour tout le monde, commença à mugir, à meugler et à enrager tellement que
grand-père, un paysan d’origine, quitta le Sportpalast. Dégoûté ! Deux ans
après ce discours terrible de Goebbels et onze ans après le premier jour
d’Hitler au pouvoir à Berlin, ce fameux Sportpalast fut totalement détruit, le
30 Janvier 1944, il y a 7o ans aujourd’hui.
Grand-père avait quelque chose contre la
guerre en général. Pour la deuxième guerre mondiale, il était déjà trop vieux, mais
il fut quand même recruté l'hiver de l’année 1945 comme
« Volkssturmmann », « homme de la tempête du peuple », un de ces soldats de la dernière chance de 16 à 60 ans qui devaient se battre pour
« l’Endsieg », la victoire finale. Mais Grand-père déserta bientôt et
dût se cacher jusqu'à la défaite au risque d’être pendu à une lanterne comme
beaucoup d’autres malheureux « défaitistes » et
« traîtres » à la patrie.
Pourtant, pendant la première guerre
mondiale, qu’est-ce qu’il avait vécu concrètement, grand-père ?
Heureusement pour lui, Il n’avait pas eu à se battre dans les tranchées. Il avait eu la chance de
rester plutôt à l'arrière comme responsable du ravitaillement parce qu’il était
agriculteur dans sa vie civile. C’est en
patrouillant à cheval qu’il a fait ses expériences de guerre. Comme celle de la
mort de son colonel, par exemple, un souvenir qui lui arrachait encore des
larmes à 90 ans. Ou un autre souvenir qu’il m’a raconté à moi, son petit- fils,
et que je n’oublierai jamais, d’un soldat Français mort,
jeté au bord d’un sentier. « Frisch gefallen », tout juste tombé là,
ne cessait-il de me raconter au début
des années cinquante, alors que nous étions attablés avec ma grande- mère à Berlin
ouest, à manger des saucisses de Frankfurt
avec une bonne bière berlinoise :
« Tu sais, je ne pouvais pas le toucher comme j’aurais dû! J’aurais dû lui
ouvrir sa veste et lui prendre ses papiers pour les envoyer à sa famille. Tu
comprends ? » J’avais compris, pour toujours ! Ces
aventures horribles se sont gravées très tôt dans ma mémoire d’enfant. J’en
suis rempli, encore maintenant. C’est pour cela que j’ai peur de toutes les
formes de haine, qu'elles soient
vraiment nazies ou des ersatz modernes
de ce mouvement.
Mais,
comme responsable du ravitaillement allemand, grand-père était peut-être
aussi responsable de la réquisition des récoltes, de l’abattage d’arbres, de la
Zwangsarbeit. Et le travail forcé, la déportation, y a-t-il participé? Cette
question a commencé à m’inquiéter il n’y a pas longtemps. C’était quand je suis tombé sur Les Cicatrices
Rouges, le livre de Madame
Annette Becker, enseignante à l’université Paris-Ouest-Nanterre.[9] Un livre sur
l’occupation allemande de la Belgique et du nord de la France dans les années
1914/18. Ce livre m’a ouvert les yeux sur cette ‘outre-guerre’ derrière les
tranchées, c'est à dire finalement la guerre de mon grand-père. Trop tard pour
lui demander: « Qu’est-ce que tu as vraiment fait pendant la guerre
? » Il me répondrait peut-être : « Qu’est-ce je savais de tout
cela ! Je n’avais simplement pas
compris à l’époque ce que la « grande » guerre était
réellement. » Je cite Madame Becker : » La Grande Guerre a
pourtant été, sur un mode délibéré ou inconscient, un laboratoire pour le 20ième
siècle : un terrain d’expérience de la violence, un lieu d’essai pour
mettre en pratique et optimiser ses effets sur les hommes et le
matériel. » Madame Becker ne manque
pas de nous rappeler que le fameux chimiste allemand Fritz Haber est venu
observer l’effet de ses recherches sur
le champ de bataille d’Ypres. Là où les gaz étaient utilisés pour la première
fois massivement sur des humains dans l’histoire, mais pas pour la dernière
fois !
Et pourtant, il me faut ajouter que
grand-père revint de sa guerre avec un grand amour pour la France et pour ses
habitants. C’est lui qui m’a fait apprendre mes premiers mots français dans son
lit, les dimanches matins : La table, la fenêtre . . . J’ai beaucoup aimé
mon grand-père. Sans lui je serais sûrement quelqu’un autre, et je ne vivrais
peut-être pas dans notre beau Cantal !
Qu’est-ce que nous regardons là ?
Nous regardons le numéro 39 de
Capriccios de Francisco Goya de l’année 1799. Goya nous peint l’âne qui est à
la recherche de ses ancêtres. Il regarde un album comme nous regardons nos
albums de photos de famille. Moi, je
n’ai jamais vu notre âne Roudi
assis de cette façon dans son pré ! L’âne de Goya est carrément
assis sur une chaise, pas très confortablement, pas trop à l'aise avec ses deux
postérieurs, je trouve, comme moi je ne
me sens pas trop à l'aise avec mes ancêtres ! Qui sait, eux non plus
n’étaient peut-être pas si à l’aise avec moi, leur descendant, en 1968 par
exemple.
Mon père n’était pas Nazi dans ce sens
qu’un vrai Nazi devait faire partie du NSDAP, le Parti National Socialiste des
Ouvriers. Quelque chose a dû l’en empêcher. Son éducation humaniste
peut-être ? Mais il y a en avait beaucoup, des vrais Nazis qui avait reçu
une éducation humaniste. C’est bien ça qui est intéressant pour nous ce soir.
Parce que leur humanisme ne les a pas empêchés de devenir des criminels contre
l’humanité.
Un jour, peu avant sa mort, père m’a
demandé : « Qu’est-ce que tu sais d’ailleurs de moi et du
Fascisme ? » Plus qu’étonné de cette question inattendue, j’ai
répondu : « Rien ! Sauf que tu n’étais pas dans la NSDAP, et
attends ! Ça aussi: Que tu as dû tirer une fois sur une vieille partisane
polonaise parce qu’elle avait voulu tuer ton chef, de son embuscade, c'est toi
qui me l'as raconté. »
Effectivement, c’est tout ce que mon père ne m’a
jamais raconté de sa guerre, alors qu’il avait été un soldat enthousiaste
pendant des années. La guerre de mon père est restée donc son secret qu’il a
emporté dans la tombe.
Pourquoi ?
Mon père, né en 1915, a été un homme
plein de joie de vivre et avec un vrai talent à en parler en plus. Parler,
persuader, d’abord ses soldats et après la guerre tous ceux à qu’il vendait ses
machines agricoles, les Lanz Bulldog d’abord, les John Deere plus tard. Pourtant,
un des ‘Leitmotiv’ de sa vie, probablement le plus important, a été
celui-là : SI TACUISSES . . . traduit du latin en Français : Si
tu n’avais rien dit . . . tu serais resté un philosophe vivant! Il
s’agit d’une maxime du philosophe ancien grec Boéthius qui a vécu autour des
années 480/85 avant Jésus-Christ. Accusé d’avoir participé à une conspiration
contre son empereur, Boéthius fut jugé coupable de haute trahison, condamné et
exécuté.
SI TACUISSES !
Autre détail signifiant de la vie de
mon père, ce communicant par excellence : Sur toutes ses tables de
travail, et finalement sur son bureau de directeur des ventes de tracteurs de John
Deere à Mannheim, il posait devant lui sa petite statue des trois
singes : Le premier les mains devant les oreilles, le second les mains devant les yeux et le
troisième les mains devant la bouche. Je les ai encore devant mes yeux sur
ce bureau d'où il m’avait aussi organisé par Rotary mes premières vacances d’été en France, à la fin
des années cinquante.
Dommage, très dommage que je n’aie pas
demandé plus de choses à mon père ce jour où lui m’avait posé cette question
délicate. Maintenant, depuis peu de
temps, je commence à mieux comprendre
pourquoi il n’a jamais voulu parler de ses expériences de guerre. Peut-être
aurait-il aimé en parler, se soulager et partager ses souvenirs avec son
fils aîné. Mais je l’ai toujours plutôt craint qu’aimé.
Nous nous sommes rarement compris. Et quand même, ce que je suis devenu, je le
suis aussi parce que je suis son fils. La guerre du père après la guerre du
grand-père sont profondément enracinées en moi et ont eu une trop grande
influence sur ma vie, et pourtant, heureusement, le Nazisme et moi, cela ne pouvait jamais
marcher.
Vraiment ?
Nous verrons !
Mon père fut un homme normal, un homme
comme tous les autres de son époque. Et
quand la guerre est arrivée à sa porte, il l’a ouverte pour devenir officier de
la Wehrmacht, dont il a été l’un des plus jeunes et brillants officiers. Il
était le contraire de moi : orienté vers la performance, vers le succès et
la victoire ! La question que j'ai trop longtemps repoussée : Vater,
qu’est-ce que toi tu as fait dans la Wehrmacht, dans ton 19ième régiment
d’artillerie?
Puisque mon père ne peut plus répondre, je
me suis mis sur les traces de ce régiment d’artillerie envoyée à la frontière polonaise le
1er septembre 1939. Quel rôle exact
a-t-il joué pendant l’attaque surprise contre la Pologne, je ne le sais pas
encore. Ni sa responsabilité directe. Ce que se passait concrètement est non
seulement documenté par deux journaux de guerre mais aussi par une recherche
historique publiée en 2006.
Déjà le premier jour, et pas seulement
après des semaines, le 19ième régiment a commencé avec un crime de guerre.
Deux villages ont été « gesäubert und niedergebrannt », nettoyés et
incendiés, et leurs habitants, hommes, femmes et enfants abattus.[10] Pour mieux
comprendre le comportement des soldats Allemands, il faut quand même savoir
qu’ils n’avaient pas d’expérience du combat et qu’ils étaient paniqués en plus
par des rumeurs d’atrocités commises par des partisans polonais, par le Freischärler-Wahn,
la folie des francs tireurs.
Je n’excuse rien.
J’essaie de comprendre, c’est tout.
Je connais assez bien mon père. Il était
fort et fier de sa force et son courage. Un vrai casse-cou, comme le lui
reconnaissaient volontiers ses chefs. Dans les quelques informations qu'il
donne sur ses premiers jours de la guerre en Pologne, dans des lettres écrites
à ma mère, il avoue s'être beaucoup battu pendant des combats de rues à
Varsovie et avoir vraiment été dans son élément. Une franchise qu’il ne se
permettra plus pendant les semaines, les mois et les années de ce
‘Vernichtungskrieg’, cette guerre d’anéantissement en Russie jusqu'à sa blessure grave devant Smolensk. Le
quotidien de sa guerre restera complètement exclu alors de sa correspondance
conjugale.
Depuis quelque temps c’est bien connu que
la Wehrmacht a non seulement servi de cadre pour l’Holocauste, mais qu’elle a
aussi participé directement à la Shoa
par balles, à l’exécution en masse de centaines de milliers de
prisonniers russes laissées sans nourriture. Tout ça c’est prouvé. Moi, je
questionne le rôle de mon père dans ces activités. Pas seulement pour lui, mais
aussi pour moi, son fils, et pour mes enfants. Aussi parce que ces derniers
seront peut-être confrontés un jour, selon moi, à des situations telles que les
crimes de guerre qui ont été un jour commandés et exécutés par le régiment de
leur grand-père.
Avant de vous raconter
comment j'ai moi-même glissé,
sans bien comprendre ce que je
faisais, dans les violences des années 70, j’essaie de vous expliquer comment
mon père et ma mère ont exercé leur rôle
social sous le régime d’Hitler.
Vraiment : La vie peut être
belle mais bien maligne aussi !
Encore des ânes !
Mais pas seulement !
Deux têtes d’ânes avec deux têtes
d’hommes dessous. Et non seulement cela: vous voyez les traits géométriques du
triangle magique du peintre Charles Le Brune (1619 – 16909), grand peintre et
physionomiste du Roi Soleil. Il a défini
son champ de recherche physionomiste en utilisant la géométrie : ses têtes
d’hommes et d’animaux sont encadrées par un triangle isocèle. Ce triangle est tracé ou strié de lignes qui se croisent
entre les yeux, le nez, la bouche, le front et les oreilles et le fait qu'elles
soient plus haut ou plus bas entre
l’œil, le front, la bouche ou le menton renseignerait sur le caractère de
quelqu’un. Charles le Brun fut en fait une sorte d’ancêtre de nos recherches de
biométrie moderne, qui aboutissent de nos jours à des vidéo-caméras des grands
magasins de vêtements par exemple : Dis-moi comment tu es bâti et nous te
dirons ce que tu achèteras !
Puisque nos vies se jouent entre destin
et expérience, comme j’y ai fait allusion il y a quelques instants, la vie
laisse des traces dans nos visages et plus profondément dans nos caractères. La
vie nous forme, imprime ses expériences en nous. Grand-père, mon père et moi,
nous avons été façonnés par des expériences militaires. Grand-père et mon père
directement par leur expérience personnelle,
moi comme enfant ayant vécu pendant et après la guerre. Grand-père plein de dégoût pour la guerre,
mon père façonné par son désir de la guerre. Moi,
quelque part entre les deux, je suis
fasciné et terrorisé à la fois.
Vous verrez !
Dernier retour aux
années trente en Allemagne, quand Hitler avait redonné de la fierté nationale à
son peuple humilié à Versailles. En plus, économiquement ça roulait bien dans
le nouveau « Reich de Mille Ans ». Et pas seulement sur les
autoroutes, mais aussi dans les usines et surtout dans les usines d’armes. Mon
père, Jeune, pensa saisir la chance de sa vie, déjà avant la guerre
en s’engageant dans l’armée, pour
devenir un vrai homme, un homme de combat ! Il n’était pas spécialement,
juste normalement brutal et parfois doux aussi. Comme beaucoup de pères
prussiens qui, encore après la guerre, trouvaient normal de punir leurs enfants
avec une cravache. Je l’ai senti pas mal, la cravache de mon
père. Comme lui l’avait sentie de son père.
Avoir eu du pouvoir sur les hommes et
leur machines, sur ces voitures, tanks et canons, Ça a dû le tenter beaucoup ! Dans son drôle
de travail, à part du commun, dont on pouvait être spécialement fier, avec ses
dangers, et le danger de mort
finalement. Et pour tout dire, en dehors de toute idéologie. Comme il y a l’art
pour l’art il y aussi la guerre pour la guerre, fasciste ou staliniste, n’importe !
Ce qui importe : le travail doit être bien fait. Made in Germany ! Le
mieux fait, le mieux payé. C’est simple. Aucun miracle allemand ! Wo ist das Klavier ? Où est le
piano ? Disaient les Allemands souvent autrefois pour affirmer : nous
ensemble, nous sommes capables de tout faire ! C’est pour ça aussi qu’ils
ne se sentent pas personnellement coupables après, ces Nazis, ces grands pères,
pères et petit fils ...
La guerre, avec sa grande gueule,
attire et change les hommes et les femmes.
Aussi
ma mère ?
Ma mère vivait la guerre
comme vivent sûrement les mères qui survivent aux guerres d'aujourd'hui, sans
en savoir trop sur elle. Ma mère avec ses deux petits enfants adorés, profita des petits plaisirs et
loisirs ordinaires tant qu'une vie
normale fut possible, jusqu'à la
catastrophe et la fuite dans les bois au moment de la déroute finale . . .
Nous regardons un tableau du peintre
Johann Heinrich Füssli (1741 – 1825), une illustration de ce que Shakespeare
fait dire à Titania, dans « Songe d'une nuit d'été » : « Il me
semblait », dit-elle, « qu’un âne a pris mon cœur en otage. »
Titania vient de se réveiller blottie
contre un âne. Contre son amant à tête d’âne qui voudrait bien que cette
métamorphose ne soit qu’un mauvais rêve. Mais non! C’est vrai et ça fait peur.
Les Hommes et les femmes, comme nous le dit Shakespeare, sont plus proches des
ânes que nous ne le croyons. Et
pourtant, imaginez un tel réveil!
Ma mère, elle, se réveilla trop tard. Je
lui ressemble en cela. Elle aimait trop et trop tôt mon père. Née en 1917, elle
se fiança déjà en 1933, à 16 ans, en
toute discrétion naturellement. Mes parents se sont finalement mariés en
février 1940, presque six mois après le début de la guerre. Un mariage de
guerre ? Je ne le
sais pas.
Comment vivait-elle, ma mère ? Dans
une jolie banlieue de Berlin, tout près des lieux où palpitait le cœur du
pouvoir, de la dictature. Elle vivait bien, très bien même. Bon, son mari était loin, mais son argent sur le compte en banque.
Elle vivait en sécurité, totalement
concentrée sur ses deux petits chéris, ma sœur et moi. Ses lettres à mon père
le montrent bien. Elle aimait être mère, avec ses petits ennuis bien sûr, et de
temps en temps, avec le regret secret d’avoir abandonné sa formation de gymnastique thérapeutique, sûrement avec l’angoisse pour son mari soldat au
front, pas toujours, avec la peur de la mort, mais pas tous les jours non plus.
Heureusement aussi qu’il y avait les ‘Heimaturlaube’,
les permissions de mon père, bien méritées. Les vacances de ski aussi bien
méritées... Elle adorait faire du Ski, on pouvait tout oublier – une vraie vie moderne et confortable avec
ses petites escapades, jamais bien loin pourtant de l’enfer allemand !
Les lettres de mon père reflètent la même
chose. On dirait que ces deux- là vivaient dans un pays un peu à part, presque
normalement paisible. On s’habitue! Bon, il y avait la censure, il fallait faire attention, ne pas tout dire,
bien sûr. Restons dans le privé alors, c’est plus confortable aussi et évitons
la politique et surtout pas de critique du pouvoir. Jamais ! C’est
dangereux, cela ne s'écrit, ni ne se
fait. Reste l’amour, beaucoup d’expressions d’amour, d’adoration des enfants,
la famille, les parents et les
grands-parents, de temps en temps un mort, oui, plusieurs morts. Drôle de guerre en Russie, drôle de paix à
Berlin !
Refoulons ! Refoulons !
Et les juifs alors?
Le jour du bombardement de Lankwitz, jolie
banlieue fleurie de Berlin, le 23 août
1943, l’appartement de ma mère fut complètement détruit. Nous, ma mère et ses deux enfants de deux et un
an, avons survécu par hasard, simplement
parce que nous n'étions pas là mais à la campagne, en vacances d’été, loin des
bombes et de l’Holocauste.
Comment mes parents ont-ils réussi, après
avoir perdu leur appartement à Lankwitz en 1943, à trouver une belle petite
villa à Zehlendorf, Banlieue berlinoise plus chic, plus riche encore ? Mon
père, après avoir été blessé au cours du
bombardement total de la belle ville de Smolensk au printemps de l’année 1942,
ne retourna plus au front, mais, grand pas de carrière, entra à l'OKH, un des trois ‘Oberkommando de
la Wehrmacht’. Je ne sais pas encore ce qu’Il a fait là. Une chose est presque
sûre : Il avait de bonnes connections ! Ayant une position
privilégiée dans la bureaucratie militaire, il a bien sûr pu utiliser ses
relations pour obtenir le droit de vivre dans la petite villa de Zehlendorf. Et
pourquoi pas faire jouer ses relations, c’est commun et n’est pas mal en
soi. Sauf que dans ce cas-là, la villa avait été « arisées », ce qui
veut dire que les propriétaires
juifs avaient été expropriés et déportés
à Auschwitz. C'est comme ça que je suis devenu quelqu’un qui
a joué et dormi dans la chambre de ces enfants qui furent tués dans une chambre
gaz, devenu complice, bien malgré moi puisque moi-même un enfant, d'un crime
contre l'humanité. Leur maison fut notre maison aussi et, comme il me semble
aujourd’hui, très normalement. Sauf que mes parents n'ont jamais parlé, plus tard, de
cette situation. Ou plutôt c'est ce que je croyais, jusqu'à il y a quelques
jours.
Que s'est-il donc
passé ?
Juste au moment où j’écrivais sur cette
maison et sa sinistre histoire, ma sœur
m’a appelé d'Amérique et je lui ai parlé de notre conférence. Et là, elle a commencé à se souvenir et à me raconter les
faits suivants : C’était au début des années soixante, notre mère lui
avait raconté comment dans les années trente, dans son école de gymnastique,
des belles filles aux yeux bruns et aux cheveux noirs disparaissaient les unes
après les autres, que leurs bancs restaient vides, qu’on ne savait pas bien
pourquoi, mais qu’on n’osait pas en parler non plus. Qu’elle avait essayé d’en
parler à la maison où elle devait se taire finalement après des discussions difficiles. Et puis ma sœur
m'a expliqué aussi que notre mère lui avait dit à elle que nous avions habité
dans une maison dont on avait chassé les propriétaires juifs. Ma mère parlait
de tout cela avec beaucoup de tristesse.
Mais, ce qui est bien triste aussi, est
le fait que ce souvenir privé du passé de notre famille, raconté à travers
l’Océan Atlantique, a très probablement été enregistré par le service secret
Français DGSE, la Direction Générale de la Sécurité Extérieure. La DGSE est
capable de mettre sur écoute 70 millions de communications téléphoniques en
deux mois, le saviez-vous ?[12]
Alors pourquoi pas les miennes ?
Je me le demande. Après un passé militant pendant les années
70, mes vingt ans de disparition au Japon et mon retour en France et pas en
Allemagne, cette vie bien calme et bien cachée en pleine campagne,
dans le Sud du Cantal, au milieu de nulle part, c'est louche,
chelou ! Il manque encore quelque
chose, un petit détail. Pas de confrontation avec la Police pendant une
manifestation anti-nucléaire ? Non, mais ... ah oui, bien sûr : Le
père de sa petite-fille à Francfort,
n’est-il pas un militant antifasciste ?
C’est toute une famille, une bande !
EINE GANZE SIPPE !
Cela se passait comme ça autrefois. Qui
nous garantit que grâce à la NSA et à ces complices en Europe, cela ne se
répètera pas encore d'une autre manière ? Big Brother ? Clique, clique !
J’y reviendrai !
Qui est-ce?
Un homme, plutôt jeune que vieux, sur son
âne. C’est Tischbein ! Nous le connaissons déjà, l’ami des ânes et de
Goethe. Ici il regarde et rêve dans la campagne de Rome. Il ne voit pas loin,
il voit devant lui, pas plus loin que ses pieds. Son âne voit un peu plus loin
que lui. Ils se ressemblent, tous les
deux. Comparons la forme du chapeau et celle des oreilles de l’âne. Même
attitude, non ? Et quelle drôle de cravache, une branche dépouillée de feuilles, ou un arbrisseau arraché quelque
part au bord du chemin. Si c’était DIE BLAUE BLUME, la FLEUR BLEUE des
romantiques, cet homme serait moi autrefois.
Quand, tout en rêvant éveillé, je me suis
retrouvé dans un groupe de jeunes gens d'extrême-gauche pendant
les années 70 du siècle dernier. La Décennie Rouge, rouge de l’Armée Rouge en
Allemagne de l'ouest et en Italie, les deux sociétés descendantes des
fascistes. Les Maoistes comme moi, nous étions moins brutaux. La violence
terroriste ne faisait pas partie de notre programme politique mais cette option
politique traînait quelque part dans nos têtes.
Et Mao ? Qu’est-ce que je savais sur lui
et sur son régime totalitaire ? Pas beaucoup, je l'avoue, seulement la
propagande sur le Grand Timonier qui m’a tellement impressionné parce qu’il
avait libéré ses paysans. Une autre sorte de Tolstoi, une idole pour un petit-
fils de paysans rêveur. Alors, je me
suis laissé guider, j'ai suivi... En
réalité je m’en fichais plutôt de ce qui se passait à l’autre bout du monde. Et
je ne savais pas, comme la plupart des étudiants et intellectuels Allemands et Français aussi, que Mao fut
responsable des plus grandes crimes
contre l’humanité du 20ième siècle.
Quelle chance encore pour moi, d’avoir
vécu tellement loin des ces terreurs infligées à des populations entières. Qui
sait ce que je serais devenu si j'étais allé là-bas ? Nous étions vraiment
enragés, plus qu’indigné. Pourquoi je n'y suis pas allé ? D'abord, on
allait plutôt au Chili à ce moment-là. Et on
n’était pas vraiment invités là-bas, sauf quelques-uns de nos chefs ! Et mes idées
révolutionnaires étaient vagues, floues, sur la Libération comme sur la dictature
du prolétariat. J’étais d'une ignorance crasse. Et quand même j’ai suivi, je me suis engagé,
enthousiasmé par l’idée d’une grande et nouvelle liberté socialiste, alors que
les idées de Mao Tse-tung avait déjà été perverties au point d’entraîner la
misère totale et la mort de millions de gens. Voilà la plus grande erreur
politique de ma vie. Mais comment est-ce
arrivé ? Comment je suis devenu un sympathisant, un suiveur, un mouton de
Mao ? La question se pose dans les mêmes termes, je pense, pour les
jeunes Toulousins qui veulent partir aujourd'hui en Syrie.
Vous ne l'imaginez peut-être pas, mais je
vivais librement dans les années soixante-dix à Berlin ouest, bien à l'abri
derrière le mur qui nous séparait de la Stasi et de l'empire soviétique. Père
de deux petits enfants, j’enseignais l’Allemand et la littérature à
l'Université Libre de Berlin. Et je
préparais aussi ma thèse sur la littérature, la littérature de la guerre. Pourquoi la guerre ? Pourquoi pas
l’amour ? Tous ces matins, avant les enfants, avant le travail et les
études, à 5h j’étais dans les rues, devant les usines et les hôpitaux, le Drapeau
Rouge et des tracts dans mes mains. Rien que cela ?
Non. J’ai travaillé aussi comme rédacteur et auteur dans la presse de notre
parti maoiste. Comment ? Avec un grand manque de personnalité individuelle
et sans ironie du tout. Finalement, très tard, j’ai commencé à me demander si
je n’étais pas moi aussi une sorte de petit ‘Schreibtischtäter’, un criminel de
bureau. Aujourd’hui, je dirais que oui.
Pourquoi cette soumission ? Pourquoi
cette servitude ? Parce que j’ai cherché un appui, quelque chose pour me
soutenir, une nouvelle orientation dans ma vie, après deux événements qui m’ont
gravement choqué: le suicide de ma mère en 1966 et le meurtre de Benno
Ohnesorg, germaniste comme moi, tué un an plus tard en 1967 pendant les
protestations des étudiants contre la visite du Schah Réza Palévi à Berlin ouest. Tué par une balle dans la tête par derrière,
tirée par un policier, non pas pendant une bagarre mais froidement dans une
arrière-cour de ma ville natale.
Et 1968 ?
L’année de la grande révolte des
étudiants dans le monde, comment je l’ai vécue ? Ça commençait mal, très
mal à Berlin ouest ! Le 11 avril
1968 Rudi Dutschke, un leader, la tête pensante du mouvement des
étudiants, se fit tirer dessus en
roulant à vélo au Kurfürstendamm, les Champs -Elysées de Berlin ouest, presque
tué par un pauvre jeune manœuvre fanatisé par les articles de la Bild-Zeitung,
un journal populiste qui était contre le mouvement des étudiants. Le vent de la
colère se leva. Qu’est-ce que j’aimais ce vent dans mon nez, e Vent qui devait
nous porter vers la libération de tout le monde ! Mais la Liberté, c’est
bien compliqué ! La liberté ne sent pas seulement bon, elle sent mauvais
aussi. Et la violence, elle, n’est
jamais loin. Nous étions confrontés à elle et nous l’avons confrontée. Et moi, j’ai marché avec tout ça.
Quelle métamorphose, ce jeune homme errant
dans la vaste forêt de la liberté! Qui dans son enfance, ne savait même pas
marcher comme tous les autres écoliers de son école. Nous sortions
parfois de l’école pour des excursions dans les bois. On nous faisait alors
marcher par deux en une longue colonne, mais moi, je n’y arrivais pas. Ou bien je marchais sur les talons de
celui qui était devant, ou celui derrière moi me marchait dessus.
Résultat ? Je marchais à côté de la colonne. Et l’instituteur
m’engueulait : Hände aus den Hosentaschen ! Mains hors des
poches !
Revenons maintenant, pour finir cette
conférence, après avoir tant parlé du passé, au présent. Qui est
celui-là ? Il s’appelle Sascha Lobo, lui aussi un combattant pour la
liberté. Profondément déçu depuis qu'il a compris, l’été dernier, que son rêve
d'internet totalement libre n'était qu'une utopie. Il avait été le ‘Vordenker’,
le penseur d'avant-garde de l’internet en Allemagne, ce qu’il n’est plus après
les révélations faites par Edward
Snowden, un vrais héros[13], à mon avis, du
combat pour la défense de la liberté de l’individu moderne.
Où en est-on avec notre liberté
aujourd’hui ? Est-ce qu’elle n’est pas en danger de nouveau ? Ce jeune homme-là, avec son beau crâne rouge iroquois, nous
rappelle la tradition combattante des
tribus iroquoises en Amérique, autrefois anéanties par nos ancêtres qui avaient
fui la contre-révolution européenne. Ce
Sascha Lobo, donc, pense que la NSA, La Sécurité Nationale de l’Amérique ?
lui à volé sa liberté personnelle. Il ne se sent plus en liberté dans son pays.
Nous faut-il donc déjà la recréer, la
reconquérir, cette liberté ?
Peut-être !
La Liberté ne nous est pas donnée. Nous
l’avons conquise. La liberté n’est pas un don éternel. Cette idée, nous la trouvons aussi dans le
dernier film de Steve McQueen. Ce metteur en scène Britannique noir nous
raconte dans 12 years a Slave, Douze ans
comme Esclave, l’histoire d’un homme
libre, qui se fait enlever par des braconniers sudistes qui le réduisent en
esclavage. Voilà le message de ce film : La Liberté est un bien que n’est
jamais acquis ! [14] Mais, pourquoi
ce film de nos jours ? Est-ce que nous ne sommes plus libres ? En
Syrie, en Ukraine, dans de nombreux pays d’Afrique, en Chine et en Corée du
Nord, nous ne le serions sans doute pas. Et ici ? Ici en France, en
Allemagne, en Europe et en Amérique, nous
ne serions pas libres ?
Si !
Mais de moins en moins, je trouve.
La liberté démocratique meurt aussi au nom
de notre sécurité, et nous nous laissons faire, nous ne protestons presque pas. Pourquoi ? Parce
que ça ne fait pas mal, la Sécurité Nationale Américaine et ses complices en
Europe ne nous font pas crier de douleur. Comme le sociologue allemand, Ulrich
Beck, le disait,[15] le cœur de notre liberté, la vie privée de
l’individu, est maintenant en prison informatique et cela avec l’accord
implicite de la majorité de toutes les populations d'Europe et d'Amérique, que
dis-je, du monde. Phénomène étrange, je trouve, et déjà un peu ancien !
Et nous, dans nos pays libres, comme on
dit, nous découvrons maintenant, un peu tard déjà, que tous nos moyens de
communication électroniques, nos ordinateurs et portables, smart-phones et même
nos frigos, peuvent être espionnés par la Sécurité Nationale Américaine, mais
bien sûr, aussi par les services Français, anglais, allemands, russes ou par
des criminels de n’importe quelle nationalité. Il y a quelques jours en
Allemagne, on a volé les codes et les mots de passe de 16 millions de
comptes-E-mails ... La liste des déraillements de nos systèmes informatiques
est longue. Sans parler des véritables guerres secrètes sur internet ! Il
y a le Stuxnet par exemple, ce ver
informatique qui a mis hors circuit des centrifugeuses du site nucléaire de
Natanz en Iran en 2009/10. Autre exemple, en Mai dernier, la presse américaine révélait que les plans
de systèmes d’armement, d’avions de
chasse et de missiles avaient été dérobés lors d’une vaste opération de
cyber espionnage.[16]
Tout cela, on nous en parle à petite dose
quotidiennement, sur nos écrans ou
devant nos télévisions où nous sommes confortablement installés. Alors que nos
grands- pères et nos pères ont été
surveillés, emprisonnés ou torturés par
la Gestapo, le KGB ou par la Stasi, c’est bien oublié maintenant
tout cela ! Et pourtant aujourd’hui nous sommes beaucoup mieux observés,
manipulés et contrôlés . . . plus
discrètement, mais, BIS AUF DIE
UNTERHOSEN , comme on dit chez nous : Jusqu’aux culottes !
Mais moi, JE N’AI RIEN FAIT, me direz-vous, alors JE
M’EN FICHE. Vraiment ? Même d’être observé un jour jusque dans votre
baignoire ou dans votre lit ? Vous avez vu les nouvelles caméras de rue,
en fait, elles peuvent même vous observer à travers vos fenêtres, nous n'en
sommes plus protégés que par un brouillage ? Pas de problème ? Alors là, c’est bien vrai, ce que Steve
McQueen a dit : « C’est très difficile de sortir de l’esclavage
mental ! »
Il m’énerve celui-là, direz-vous. D’abord,
il nous compare à des ânes, et maintenant, nous serions des esclaves ! Lui
peut-être, mais pas moi. Je vous en prie, mesdames et Messieurs, réfléchissons
encore un peu. Depuis qu’on nous observe, contrôle, qu'on nous manipule,
bio-métrise, ou scanne corporellement, depuis que nous avons largement dépassé
les scénarios les plus pessimistes de Georg Orwell en donnant à Google la
permission de nous espionner dans nos actes et dans nos pensées publiques et
privées, nous aidons nous-mêmes librement nos ingénieurs électroniques en portant sur nous ou jusque dans nos lits leurs créations, nos portables et autres
tablettes . Sommes-nous de nouveaux somnambules ? Est-ce que nous ne
sommes pas dans un grand trou noir, sans le savoir ? Comme peut-être, en
l’année 1914 ? Des somnambules qui
cette fois sont plongés dans une consommation effrénée et dans des grands fleuves d’argent planétaires
incontrôlables.
Moi je ne veux pas ça, mais je ne sais
pas, comme vous peut-être, comment me
défendre. Comment sortir de ce filet virtuel qui est tombé sur nos têtes ?
Qui est-ce ?
C'est Catherine Deneuve dans le film Peau d’°Ane(1970), mis en scène par Jacques Demy. Ce costume lui va
vraiment bien. Mais pourquoi ?
« Le costume d’âne », nous dit Jutta Person, critique berlinoise
de littérature et auteure du livre où
j’ai trouvé mes tableaux d’ânes, « ne la rabaisse pas, ne la salit
pas. Cette peau d’âne lui va bien, parce
qu’elle joue souverainement avec. La plus grande coquetterie se cache dans
l’oubli de soi. C’est pour cela que Catherine Deneuve est vraiment une
déesse du film ».
Malheureusement, nous ne sommes pas des
Dieux, mais heureusement, nous ne vivons pas dans l'oubli de nous-mêmes, au
contraire, nous sommes de plus en plus alertés et conscients des conditions
politiques et morales de nos vies.
Alors pourquoi cette image à la
fin de notre conférence ? La réponse se cache
dans le conte de Charles Perrault à l'origine du film « Peau
d'âne » : Es war einmal, il était une fois un Roi qui poursuivait de
ses assiduités sa propre fille, la seule aussi belle à ses yeux que sa femme
morte. Pour échapper à son père, la fille exige de lui les choses les plus
impossibles, et en désespoir de cause,
elle demande à son père la peau de l’Âne d’Or qui s’appelle
‘Banquier’ et qui a fait la fortune du Roi. Le père va jusqu'à tuer Banquier pour la posséder, et la fille est
forcée de s’enfuir dans un pays lointain où elle travaille comme servante dans
une porcherie, toujours habillée de sa peau d'âne d’âne toute crasseuse.
Finalement, un prince tombe amoureux d'elle en découvrant une très belle femme
sous ses haillons, ils se marient et ils ont beaucoup d'enfants... .
Quelle est donc die Weisheit, la morale
de cette histoire ?
La voici: Il ne faut pas juste tuer l’âne
d’or, le Banquier.
Il faut l’oublier !
Oublier les banquiers et leur argent. Il
faut inventer autre chose.
L’âne d’or est mort !
Vive l’amour et la
discussion !